Prescrire le réemploi des matériaux sur une opération de déconstruction, rénovation ou réhabilitation de bâtiment

Réemploi de matériaux

Le secteur du bâtiment génère une quantité considérable de déchets chaque année, en grande partie issus des travaux de déconstruction. Face aux enjeux environnementaux croissants, le réemploi des matériaux est devenu une solution incontournable pour réduire l’empreinte écologique des projets de construction. Cependant, prescrire le réemploi des matériaux dans les marchés de travaux de déconstruction nécessite une approche structurée. Voici comment intégrer efficacement ces pratiques dans les appels d’offres et les marchés publics.

 

1. Identifier les matériaux avec un potentiel de réemploi dès la phase de diagnostic

La première étape pour favoriser le réemploi des matériaux dans un projet de déconstruction est d’effectuer un diagnostic PEMD (Produits Equipements Matériaux et Déchets). Cette étape permet d’évaluer la nature et la quantité des éléments potentiellement réemployables. Parmi ces matériaux, on peut retrouver :

  • Le bois (poutres, planches, parquets)
  • Les métaux (acier, aluminium)
  • Les briques, pierres et tuiles
  • Les éléments de second œuvre (portes, fenêtres, carrelages)
  • Equipements techniques (groupes électrogènes, groupes froids, etc …)

Ce diagnostic doit être réalisé par un professionnel agréé et doit faire partie intégrante des documents d’appel d’offres afin de sensibiliser les entreprises soumissionnaires aux objectifs de réemploi.

 

2. Inclure des clauses spécifiques au réemploi dans les CCTP

Le Cahier des Clauses Techniques Particulières (CCTP) est un document essentiel dans un marché de travaux. Pour encourager le réemploi des matériaux, il est nécessaire d’y intégrer des clauses précises qui imposent ou incitent au réemploi des matériaux issus du site de déconstruction ou de sources externes. Ces clauses peuvent inclure :

  • L’obligation de réemploi d’un pourcentage déterminé des matériaux sur site
  • Un BPU (Bordereaux de Prix Unitaires) détaillant le surcoût lié à la dépose soignée à remplir par l’entreprise travaux
  • Les conditions de reprises (planning, conditionnement, transport, etc…)

 

3. Intégrer le réemploi dans les critères de sélection des entreprises

Afin de favoriser le réemploi des matériaux, il est crucial de le prendre en compte dans les critères de sélection des entreprises répondant à l’appel d’offres. Ces critères peuvent inclure :

  • L’expérience de l’entreprise dans des projets de déconstruction sélective et de réemploi.
  • La capacité de l’entreprise à documenter et tracer les matériaux réemployés.
  • Les solutions innovantes proposées par l’entreprise pour maximiser le réemploi sur site ou hors site.

La pondération de ces critères doit refléter l’importance accordée au réemploi dans le projet.

 

4. Mettre en place un suivi rigoureux pendant les travaux

Pour garantir la bonne application des clauses de réemploi, un suivi rigoureux doit être mis en place tout au long des travaux. Cela implique :

  • L’identification des repreneurs et l’échange avec toutes les parties prenantes du projet (à effectuer en amont, au moment du diagnostic PEMD)
  • Un contrôle régulier sur la dépose soignée des matériaux.
  • La traçabilité des matériaux réemployés, avec des fiches techniques et des certificats de cession ou de transfert de propriété

 

5. Sensibiliser les parties prenantes et favoriser la collaboration

La réussite d’un projet incluant le réemploi des matériaux repose sur la collaboration de tous les acteurs : maîtres d’ouvrage, entreprises de déconstruction, architectes, bureaux d’études, etc. Une sensibilisation et une formation spécifiques sur les enjeux du réemploi doivent être proposées à chaque partie prenante pour garantir une compréhension commune des objectifs et des méthodes à adopter.

 

6. Encourager l’économie circulaire et les circuits courts

Le réemploi des matériaux s’inscrit pleinement dans une démarche d’économie circulaire. En encourageant l’utilisation des matériaux de réemploi locaux, il est possible de réduire les coûts de transport et l’impact carbone du projet. Les marchés de travaux peuvent prévoir des partenariats avec des plateformes de réemploi ou des entreprises spécialisées pour favoriser les circuits courts.

 

7. Avantages et bénéfices du réemploi dans les marchés de déconstruction

La prescription du réemploi des matériaux dans les marchés de travaux de déconstruction offre de nombreux avantages :

  • Réduction des déchets : en réemployant les matériaux, on réduit la quantité de déchets envoyés en décharge ou en incinération.
  • Économies financières : bien que le réemploi nécessite un effort initial en termes de dépose et de logistique, il permet dans certains cas la valorisation financière de certains éléments et la réduction des coûts d’achat de nouveaux matériaux.
  • Impact environnemental réduit : en limitant l’extraction de nouvelles ressources et en diminuant l’empreinte carbone liée à la fabrication et au transport des matériaux.
  • Préservation du patrimoine : certains matériaux anciens réemployés peuvent offrir une esthétique unique et une qualité difficile à retrouver dans des matériaux neufs.

 

En conclusion

Prescrire le réemploi des matériaux dans les marchés de travaux de déconstruction est un véritable levier pour rendre les projets de construction plus durables et économiquement responsables. Cette démarche nécessite une organisation rigoureuse, des clauses spécifiques dans les documents contractuels, un suivi strict et une collaboration active entre toutes les parties prenantes. En adoptant ces pratiques, les acteurs du bâtiment peuvent contribuer significativement à la transition écologique et à l’économie circulaire, tout en répondant aux enjeux légaux et environnementaux croissants.