Le comblement de carrière de gypse (CCG) : une opportunité de valorisation des déblais issus des chantiers linéaires en Île-de-France

En Île-de-France, les grands chantiers linéaires d’aménagement du territoire (Grand Paris Express, EOLE, CDG Express, etc.) génèrent depuis quelques années un surcroit de déblais. Une très grande partie provient de couches géologiques sédimentaires en place, le reste est issu de niveaux remaniés ou anthropisés. La gestion / revalorisation de ces importants volumes de déchets est un enjeu majeur, à la fois environnemental et économique. En effet, les moyens pour limiter l’incidence environnementale des évacuations de terres sont multiples :

  • tri et réemploi in-situ,
  • recyclage et économie des ressources naturelles,
  • valorisation matière ou énergétique,
  • limitation des distances de transfert et transports alternatifs,
  • etc.

Parmi les déblais rencontrés dans ces grands chantiers franciliens, une partie est constituée de matériaux contenant des « terres sulfatées » en place ou remaniés. Dans cet article, une solution de valorisation souvent méconnue du grand public et liée au contexte francilien vous est présentée : le Comblement de Carrière de Gypse (ou CCG).

Le gypse : une richesse du sous-sol francilien

Le gypse se définit comme une espèce minérale constituée de sulfate de calcium et de molécules d’eau (CaSO4 ∙ 2H2O). C’est la matière première pour la fabrication du plâtre (obtenu par déshydratation partielle, purification et broyage du gypse), l’un des plus anciens matériaux de construction utilisée par l’homme. En Île-de-France, les gisements exploités sont des masses de gypse d’une grande pureté (>95% de CaSO4).

Depuis plusieurs siècles et de nos jours encore, le gypse d’origine naturelle est exploité en Île-de-France dans des carrières qui peuvent être à ciel ouvert ou souterraines (ex. : Cormeilles-en-Parisis (95), Vaujours (93), Saint-Soupplets (77), etc.).

La remise en état des carrières de gypse

En France, la remise en état des carrières est une obligation réglementaire qui remonte à 1972. Celle-ci est préférentiellement coordonnée à l’exploitation du gisement (pour limiter les impacts environnementaux en cours d’exploitation) et doit être achevée dans la durée de validité de l’Arrêté Préfectoral d’autorisation (rubrique 2510 de la nomenclature des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement).

L’exploitation de ressources minérales du sous-sol pour la filière matériaux de construction génère en particulier des cavités aériennes ou souterraines qui peuvent être de très grandes tailles. Leur comblement partiel ou total est une réponse à divers enjeux sécuritaires et environnementaux : stabilité du sol et du sous-sol, circulation et qualité physico-chimique des eaux, écologie, vocation ultérieure du site, etc.

Les carrières aériennes ou souterraines de gypse (ou d’anhydrite) présentent des caractéristiques géochimiques et géotechniques bien spécifiques et les déblais admissibles pour leur comblement doivent être compatibles avec celles-ci. En effet, les déblais sulfatés ne sont ni toxiques ni dangereux ; néanmoins, ils ne sont pas considérés comme des déchets inertes « classiques » car la capacité de dissolution du gypse est relativement importante. Cela peut provoquer un enrichissement local en sulfate, et donc une potentielle contamination des eaux souterraines.

Conformément à l’article 12.4 de l’arrêté du 22 septembre 1994 modifié, le comblement des carrières de gypse et d’anhydrite peut être réalisé à l’aide :

  • de déchets d’extraction internes à la carrière ;
  • de résidus de fabrication venant des usines de production de plâtre ;
  • de déblais provenant de chantiers de terrassement extérieurs à la carrière pouvant contenir du gypse en plus ou moins grande quantité. Sauf exception, les solutions de valorisation de déblais inertes s’effectuent à une échelle locale (distance chantier – exutoire inférieure à 30 km) et se font essentiellement via un transport routier.

Même si certains chantiers concernent des couches géologiques contenant du gypse, les techniques de décaissements mises en œuvre ne permettent pas d’obtenir des déblais d’une pureté suffisante en CaSO4  pour pouvoir être réutilisés comme matière première pour la production de plâtre.

Cette première partie du XXIème siècle est marquée par de grands travaux d’aménagement en Île-de-France générant des quantités très importantes de déblais dont des terres sulfatées. Si celles-ci ne contiennent pas d’autres polluants, elles peuvent être valorisées dans le cadre de la remise en état de carrières de gypse. Le CCG en Île-de-France est donc une réelle opportunité de valorisation de ces déblais sulfatés, bien qu’il existe quelques rares autres sites pouvant les accueillir en « inertes plus ». Cette possibilité de valorisation est une alternative judicieuse à promouvoir afin d’éviter l’élimination de ces terres en filière ISDND (Installation de Stockage de Déchets Non Dangereux).

Mehdi C.

Ingénieur environnement chez TRACE