Une petite révolution réglementaire pour la traçabilité des déchets : l’arrivée des registres nationaux et la mise en place de la sortie du statut de déchets

Les terres excavées représentent un volume non négligeable des déchets du BTP, environ 180 millions tonnes sur les 260 millions de tonnes de déchets produits chaque année par le secteur (source BRGM).

Ces volumes importants pourraient impacter l’environnement s’ils ne sont pas encadrés par un cadre législatif fort. C’est dans ce contexte que sont parus en 2021 plusieurs textes relatifs à la sortie du statut de déchet des terres excavées (décret 1 avril 2021, arrêtés du 4 juin et du 21 décembre 2021), l’objectif étant de pouvoir valoriser une ressource, ici les terres, compatible avec un site receveur dans le cadre du principe d’économie circulaire.

L’autre évolution réglementaire est la mise en place d’une base de données électronique centralisée, créée par décret du 25 mars 2021, dont l’objectif est de récupérer les informations des producteurs ou détenteurs de déchets dangereux et de déblais. Cette base de données est constituée de deux registres dont le contenu est fixé dans l’arrêté du 31 mai 2021. L’objectif de ces registres est de mettre en place une base de données nationale dans le but d’assurer une meilleure traçabilité des déchets, l’un étant dédié aux terres excavées et sédiments.

Ces registres imposent des délais de transmission des informations relativement courts, à savoir 7 jours pour les déchets dangereux (après production, expédition, traitement et réception) et au plus tard le dernier jour du mois suivant l’expédition, la réception, le traitement et la valorisation quand il s’agit de déblais. Auparavant, les informations du registre tenu par chaque producteur ou détenteur de déchets devaient être conservées pendant 3 ans, mais dès lors que les nouveaux registres nationaux seront opérationnels, cette obligation prendra fin avec la transcription des informations dans la base de données nationale.

L’arrêté du 31 mai 2021 impose également des informations complémentaires quant aux caractéristiques des terres, notamment :

  • Les données géographiques de la parcelle d’où viennent les terres
  • L’identifiant terrain si les terres proviennent d’un terrain placé en secteur d’information des sols (SIS disponibles sur Géorisques)
  • Les données des analyses chimiques
  • L’adresse de destination des terres
  • Les références des lots sortis du statut de déchet

Les exigences en matière de traçabilité tendent donc à se durcir. Cependant, la mise en place de la sortie de statut de déchet laisse une alternative aux producteurs de déchets. Si le décret du 1er avril 2021 ouvre à la procédure de sortie de statut de déchet aux producteurs et détenteurs de déchets, en matière de terres, ce sont les arrêtés du 4 juin et du 21 décembre 2021 qui en fixent les critères. Le premier est relatif aux terres excavées ayant fait l’objet d’une préparation en vue d’une utilisation en génie civil ou en aménagement et le second porte sur les terres naturelles excavées issues de grands projets d’aménagement.

Ces textes sont la mise en œuvre de la loi anti gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) de février 2020.

L’objectif est de valoriser les terres sans impacter négativement l’environnement et la santé.

Pour garantir cet objectif, les deux arrêtés fixent des dispositions communes sur la sortie du statut de déchet :

Dispositions communes aux arrêtés du 4 juin et 21 décembre 2021 Impacts
Tenue d’un manuel qualité répondant aux exigences de l’arrêté du 19 juin 2015 Implique la mise en place d’un système de gestion de la qualité préalable au démarrage du chantier
Etablissement d’une attestation de conformité pour chaque lot de terre (avec numéro d’identification) Garantir le maintien de la qualité du site receveur. Inscription dans le registre des références des lots sortis du statut de déchet
Préservation de la ressource en eau, des écosystèmes et de la qualité des sols Penser en amont les futures zones de dépôt et confirmer la compatibilité physico-chimique avec le site receveur
Contrôle par un tiers indépendant et impartial de chaque lot Tenir à jour et conserver la documentation justifiant le respect de la procédure de sortie de statut de déchets
Conservation des documents pendant 10 ans Exigence de traçabilité, permet entre autres d’informer un futur acquéreur d’un site ayant reçu les terres de leurs caractéristiques

La procédure de sortie de statut de déchet doit être pensée en amont du projet, et dans le cas de grands projets d’aménagements (arrêté du 21 décembre 2021), elle doit être inscrite dès la demande d’autorisation environnementale.

Si après contrôle par un tiers, les lots ne répondent pas aux exigences de la sortie de statut de déchet, ils doivent être enregistrés dans le registre national des terres excavées et traités en tant que déchets.

D’ici quelques mois, les procédures de suivi des terres devront être numériser, les nouveaux registres nationaux en sont la parfaite illustration.

Julien R.
Ingénieur environnement chez TRACE